Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 1er février 2017), que Mme Y…, engagée le 18 novembre 2004, par la société Gauthier pour y occuper, en dernier lieu, le poste de secrétaire commerciale, a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre du 13 août 2013 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l’arrêt de la condamner à payer à la salariée une certaine somme pour harcèlement moral, alors, selon le moyen :
1°/ que n’établit pas la matérialité de faits précis pouvant laisser présumer l’existence d’un harcèlement moral, l’augmentation de la charge de travail conduisant le salarié à effectuer, en sus de la durée légale du travail de 35 heures, une à deux heures supplémentaires par semaine ; qu’en n’ayant pas tiré les conséquences légales des condamnations prononcées à l’encontre de la Sarl Gautier au titre des heures supplémentaireseffectuées par Mme Y… en 2011 (43,30 heures) et 2012 (116,80 heures), ce qui, comme le rappelait l’employeur, caractérisait « au grand maximum une moyenne de 10 heures par mois, soit moins de 2 heures par semaine »), ce dont il résultait que, quels que soient l’investissement personnel de la salariée, l’aggravation de sa charge de travail après le départ de Mme K… en juillet 2011 et l’ouverture d’un deuxième dépôt l’été 2012, l’augmentation de ses horaires et parfois la réalisation de travail le week-end et des tâches supplémentaires de nettoyage, que l’arrêt constatait par ailleurs, la salariée n’établissait pas de faits précis pouvant laisser présumer un harcèlement moral, la cour d’appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
2°/ que les méthodes de gestion mises en oeuvre par l’employeur ne caractérisent un harcèlement moral que si elles se manifestent, pour un salarié déterminé, par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu’en n’ayant pas caractérisé de tels agissements spécifiquement dirigés contre Mme Y…, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
3°/ que la dégradation de l’état de santé de la salariée plus d’un an après l’augmentation de la charge de travail qu’elle dénonce, et l’accomplissement d’une à deux heures supplémentaires par semaine, ne fait pas présumer une situation de harcèlement moral ; que la cour d’appel, qui a relevé une aggravation de la charge de travail après le départ de Mme K… en « juillet 2011 », une dégradation de l’état de santé de Mme Y… « à compter de novembre 2012 », et qui a condamné l’employeur à payer 43,30 heures supplémentaires en 2011 et 116,80 heures en 2012, n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Mais attendu que, sous le couvert de griefs non-fondés de violation de la loi et de manque de base légale, le moyen ne tend qu’à contester l’appréciation souveraine par la cour d’appel des éléments de preuve et de fait dont elle a déduit l’existence de faits précis permettant de présumer l’existence, à l’égard de la salariée, d’un harcèlement moral ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société fait grief à l’arrêt de la condamner à payer à la salariée diverses sommes à titre d’heures supplémentaires effectuées au cours des années 2011 et 2012, outre les congés payés afférents, alors, selon le moyen, que seules constituent des heures supplémentaires les heures de travail consacrées par le salarié au-delà de la durée légale du travail à l’exécution de sa prestation de travail sur lesquelles l’employeur peut exercer son contrôle, qui sont accomplies à la demande ou avec l’accord de l’employeur ou sont inhérentes à ses fonctions et rendues nécessaires par les tâches confiées ; qu’en ayant condamné la société Gautier à payer 43,30 heures supplémentaires (au titre de l’année 2011) et 116,80 heures (au titre de l’année 2012), sans avoir recherché, ainsi qu’elle y était invitée, si les heures supplémentaires avaient été réalisées selon les instructions de l’employeur ou du moins avec l’accord, au moins implicite, de celui-ci, ni si celles-ci étaient nécessaires à la réalisation des tâches confiées au salarié, ce que l’employeur contestait en rappelant que Mme A… faisait le travail en 29 heures, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3171-4 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d’appel, en constatant que la gérante de la société avait été alertée du surcroît d’activité auquel devait répondre la salariée ainsi que de la nécessité de revoir l’organisation de l’entreprise afin de la soulager et qu’aucun changement organisationnel n’était postérieurement intervenu, a fait ressortir que les heures supplémentaires avaient été réalisées avec l’accord implicite de l’employeur, justifiant ainsi sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
L’arrêt confirme ainsi trois choses :
- l’importance de l’appréciation des juges du fond en matière de harcèlement moral – il revient donc au salarié de prévoir un dossier conséquent pour emporter la conviction ou alors, plus radical, de se porter partie civile devant le juge pénal pour obtenir la nomination d’un juge d’instruction ;
- la référence à l’aggravation de la charge de travail, élément important qui rattache indirectement le contentieux en matière de harcèlement moral à l’obligation de sécurité qui pèse sur l’employeur ;
- le fait que, contrairement à ce que l’on trouve mentionné dans des conventions collectives, les heures supplémentaires peuvent être réalisées avec l’accord implicite de l’employeur.
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